ANALYSE 📊 Lundi dernier la Chambre d’Agriculture de l’Ariège organisait à Saint-Paul-de-Jarrat, une AGORA sur l’Eau. 150 personnalités, techniciens et acteurs de la société civile étaient réunis pour échanger, présenter leur analyse et débattre sur la partage de l’eau sur le département. S’il n’y pas encore urgence, l’épisode de sécheresse de l’été dernier a alerté et interrogé sérieusement les principaux utilisateurs sur les futures capacités de notre département, qui passait jusqu’alors pour un territoire préservé, à faire face aux prochaines crises…
La journée a commencé par un accueil très prononcé des personnels de la chambre et en particulier de son président Philippe Lacube qui exprime une volonté de faire de l’eau, une eau multi-usages et précise que cette journée de travail est volontairement organisée en deux moments matin et après midi avec des ateliers et des mélanges d’enjeux ; « car il est temps de se confronter aux enjeux de l’autre pour travailler et réfléchir ensemble et définir des orientations, des sujets où nous pourrons travailler ensemble » précise t’il.
Jean-Yves Bousquet, vice-président de la chambre d’agriculture s’enorgueilli d’être de la génération des hommes et des femmes qui ont traité le sujet les grands équipements pour l’agriculture du département ; des barrages et des outils qui permettent encore de réguler les débits de nos rivières aujourd’hui comme le lac de Montbel
Les agriculteurs ont travaillé également à la construction de retenues collinaires pour permettre aux animaux de boire, « j’ai connu l’irrigation totale, où on déplaçait les tuyaux d’irrigation de parcelles en parcelles, aujourd’hui on a évolué et automatisé ; on a appris à utiliser l’eau de manière plus rationnelle pour la plante. » avoue t’il
Aujourd’hui chacun a appris à rationaliser son usage de l’eau y compris pour se laver les dents au quotidien.
Jean-Yves Bousquet, vice -président de la chambre d’agriculture de l’Ariège
« Chaque année il y a deux milliards de m2 prélevé sur les cours d’eau du bassin , pour 90 milliards de m2 de précipitation, 54 m3 s’évaporent, avec 36 millard d’écoulement naturel et 2 milliards prélevés.. agro 850 / potable 750, industrie 500. » précise Jean-Luc Scharffe chef de service Garonne à l’agence de l’eau Adour-Garonne et « une croissance démographique qui présage un accroissement de la consommation d’eau potable notamment dans les prochaines années« . L’industrie et la désindustrialisation fait que l’industrie baisse sa consommation année après années y compris avec des efforts technologiques qui permettent d’économiser l’eau, mais ce n’est pas le cas pour les autres secteurs.
Les tensions sur l’eau sont multiples : tout d’abord la qualité de la ressource (pollutions) et ses impacts sur la biodiversité, ses conséquences socio-économiques, ses conséquences sur la santé et qui provoque des conflits d’usage, qui, avec les changements climatiques, vont renforcer ces tensions de plus en plus fortes dans l’avenir !
Les changements climatiques, vont renforcer ces tensions sur l’eau qui seront de plus en plus fortes dans l’avenir !
Jean-Luc Scharffe chef de service Garonne à l’agence de l’eau Adour-Garonne
Pour le moment l’Ariège reste relativement préservée, mais ces conflits vont apparaître dans un avenir proche et dont l’épisode de sécheresse de l’été dernier (2022), laisse présager les premiers éléments..L’été qui arrive est source d’inquiétude pour chacun !
Le changement climatique va engendrer une augmentation des températures, des manteaux neigeux plus faibles, des phénomène extrêmes, une baisse des débits des rivières et produira en 2050 un déficit du sous bassin de 660 m3 au lieu de 100 m2 aujourd’hui.
« Le tribunal de l’eau » qui est symbolisé par le Comité de Bassin Adour-Garonne tente d’agir pour que tous les leviers puissent atténuer les conséquences du changement climatique.
30 000 emplois agricoles sont directement liés ou dépendants de l’irrigation sur le bassin dans sa totalité.
Les années 70 ont connu les retenues collinaires, les années 80 une chute de la production dans les petites exploitation agricoles, dans les années 90 différentes stratégies ont été observées : les grandes exploitations sont allé vers le sec, les petites ont fait le choix de la Valeur Ajoutée et ont choisi de conserver l’irrigation (cultures contractuelles comme les semences potagères notamment) dixit Arianne Degroote de la Chambre régionale d’agriculture d’Occitanie.
L’accès à l’eau sera nécessaire dans le futur pour une transition agro-écologique, car elle permet une grande gamme de culture, des rotations de culture, une diversification des système fourragers et sécuriser les filières locales émergentes., l’irrigation et la Valeur Ajoutée permet aussi d’avoir une meilleure autonomie financière qui va permettre une adaptation ; sans argent difficile de s’adapter pour les agriculteurs ! C’est ainsi qu’il faut préciser que tous les agriculteurs n’ont pas le même rapport à la consommation d’eau.
A noter que via AgroParisTech, des méthodes sont déjà mises en place pour les démarches concertées sur l’utilisation de l’eau dans le cadre des changements climatiques (Le Varenne)
L’Agriculture en Ariège c’est 2200 exploitations, le « Mais semence » est obligatoirement irrigué par contrat et représente 13% des productions céréalières du département alimentées par 1500 pompes notamment dans la Vallée de l’Ariège
Le SMDEA deuxième consommateur d’eau du département
Le SMDEA, deuxième consommateur d’eau du département (il gère Montbel également et produit de électricité) qui était présent également à cette journée, gère 4000 Km de conduites, 12,39 millions de m3 distribués aux utilisateurs et 7,8 millions d’eaux usées traitées, 961 km de réseaux de collecte.
« Aujourd’hui, nous n’avons pas de problème de qualité de traitement de l’eau de et de distribution » précise Patrick Rescanière son directeur (à peine 6% soit 99 UDI concernées par des non conformités sur 360 UDI.) Les enjeux pour le SMDEA dans le futur, ce sera de permettre une baisse de la consommation, d’améliorer le rendement des réseaux et limiter le prélèvement. le SMEDA connait l’été des diminutions de débits prélevés » ajoute t’il. En cas de crise, l’eau potable est distribuée de plus en plus en citerne ou en bouteille d’eau ; 32 UDI ont été concernées par ces mesures d’urgence cette année. De plus en plus, Foix est en très grande tension l’été (voir épisode de l’été 2022)
Mais l’Ariège est aussi dans le Top 5 des départements producteurs d’électricité hydraulique en France , cela représente 150 emplois et 4 millions d’investissements annuels, et 15 millions de taxes et impôts retournés sur le territoire, donc l’eau est importante pour cette activité économique selon Franck Darthou directeur régional de EDF-Hydro, et l’énergie hydroélectrique fait vivre le territoire. On complète les énergies renouvelables nouvelles qui sont par nature intermittentes, pour autant la régulation imposée par EDF Hydro n’est pas neutre sur les autres usagers, à l’instar de la Fédération de la pêche, où on se plein encore et toujours des variations de niveau et de température des cours d’eau qui nuisent à la santé des populations et provoque des maladies. (notamment de la truite Fario qui est très prisée)
10% de la population ariégeoise pratique la pêche en rivière.
La qualité des eaux pour la pêche devient de plus en plus problématique pour les pécheurs et les poissons, on rejoint la problématique de sauvegarde de la biodiversité (exprimée par le Chabot et l’ANA tout deux présent à cette journée). « La sécheresse de 2022 a été catastrophique et cet épisode s’il se reproduit pourrait être fatal pour la population des truites pour lesquelles le département est très couru« . rappelle Laurent Garmendia fédération de la pêche en Ariège.