Ils étaient seize, dix-sept, en comptant le grand chien courant tout devant… Un très jeune enfant donnait la main à ses parents. Ce matin-là, les sous-bois s’illuminaient des teintes rousses et vertes d’un curieux été indien.
C’était le 1er novembre, au nord-ouest de la Bastide de Mirepoix. Ils quittaient ensemble le hameau de Senesse, s’éloignaient des méandres de l’Hers que borde la plaine de Mazerettes ; remontaient le tracé d’un sentier pré-balisé retrouvant par maints endroits le tracé d’une Voie romaine. On retrouvait là, de temps à autre, les hautes bornes cadastrales, quadrangulaires au sommet taillé en pointe de diamant des temps du cartographe Cassini (aujourd’hui couvertes de mousse), quelques autres plus récentes…
Après une rude montée, un merveilleux plateau herbeux (pâturé par des vaches) dit “de St-Loup” offrait aux regards les bleus d’aquarelle du lointain massif de Tabe, le tracé géométrique mirapicien en contrebas. Ils marchèrent et rêvèrent là où rêva jadis un ermite replié auprès de la chapelle dite « de St-Loup »… Chapelle aujourd’hui détruite : reste un monceau de pierres envahi par le végétal.
Le sentier serpentant sur ses 5 kilomètres avait été patiemment pré-balisé et défriché par deux bénévoles du groupe de marcheurs. Il mérite d’être connu, parcouru et définitivement adopté par tous les randonneurs, vététistes, et autres « curieux de nature » ; sa largeur préservée par endroit permet également, « Dieu merci », le passage des tracteurs…
Cette merveille a failli être sacrifiée sur l’autel du business… Le rachat par une société privée d’une propriété pour la culture de chênes truffiers avait commencé à « sérieusement saccager » les lieux ; suite à de gros travaux, l’empierrement de la Voie romaine a été négligemment bouleversé sur près d’un kilomètre, à la fin du circuit qui s’achève au joli hameau de Scié à cheval sur Manses et Mirepoix.
Seulement voilà : les « locaux » n’ont pas laissé faire, se rassemblant une première fois dès le 25 septembre, récidivant en cette Toussaint… Entre-temps avaient été appelés (en renfort et appui administratif et juridique) les services compétents de la Municipalité mirapicienne, qui ont eu la lourde tâche de faire simplement respecter le Code Rural… Expertise indispensable du géomètre puis laborieux « rappel à la Loi » enfin compris par les peu scrupuleux propriétaires de l’immense enclave, éloignant ainsi, miséricordieusement pour eux, une image désastreuse de « privilégiés de la Côté d’Az’ »… Bref, la f…tue clôture de deux mètres de haut a pu être (dûment) reculée pour laisser à nouveau en paix Voie romaine, usagers et bien commun…
Aujourd’hui, « la Voie » est libre : soyons nombreux à venir tous l’admirer !
La liberté des promeneurs et la simple possibilité d’admirer (sans saccager) sont aussi des « biens » à défendre par tous…