# J’Accuse … ! par Jean Dytar, un roman graphique historique qui va compter dans l’histoire des romans graphiques. Mais pourquoi dit-il cela ?
Il dit cela car cette affaire fut une fracture pour la république française. Elle a exacerbé les positions en une période où l’antisémitisme avait pignon sur rue et où le secret d’Etat s’affichait au grand jour pour laisser l’armée diriger notre pays. Elle a été le symbole de l’iniquité au nom de la raison d’état où la presse et l’opinion publique ont eu un rôle majeur dans une erreur judiciaire, qui si elle ne fait plus question aujourd’hui à laissé des traces pendant longtemps.
Mais tout d’abord l’objet en lui-même. Nous avons un album graphique de 1.230 kg comprenant 310 pages, contenu dans un coffret rouge cartonné, on retire le livre au format italien par l’intermédiaire d’une languette en tissu… magnifique présentation. L’album est composé de feuilles proches du papier journal (juste un peu plus épais) et nous avons des pages de 2 à 4 vignettes, entrecoupées de reproductions d’articles de journaux ayant existés ou pas (pour les besoins de la cause). Le dessin est réaliste en noir et blanc et rappelle par ses hachures les gravures de presse qui ont fait les beaux jours des suppléments illustrés. Les dialogues sont des reprises, des extraits de véritables textes décortiqués par Jean Dytar, et la plupart des planches sont d’une interface informatique avec des like, des pétitions en lignes et même un petit + qui permet, en scannant la page d’accéder à de multiples documents numériques complémentaires. Un petit bijou d’édition.
Quant à la méthode je laisse parler Jean Dytar : « Dreyfus, cette fameuse Affaire qu’on évoque sans vraiment la connaître, je suis allé l’explorer, voir ce qui s’est écrit dans la presse en cette fin de XIXe siècle, lire les témoignages des protagonistes, comprendre quels rapports de forces étaient alors à l’œuvre, par quels rouages les choses se sont configurées. Et j’ai été tout simplement sidéré par les résonances avec notre époque… »
Bien qu’ayant étudié avec attention cette période de l’histoire je dois reconnaitre que cet ouvrage, par ses recherches, sa relocalisation du contexte, m’a permis d’aller voir dans la finesse des positionnements. Il m’a surpris par les détails de l’évolution de la pensée, de la réflexion, des acteurs de la période (Zola, Déroulède, Jaurès, Drumont,…) et de leur implication plus ou moins grande dans ce débat qui a été fondateur, pour quelques aspects (séparation des pouvoirs par exemple), de notre cinquième république.
Assurément un objet à avoir dans sa bibliothèque.
Par Dominique Mourlane,
libraire au Relais de Poche à Verniolle